prévenir la criminalité, améliorer l’expérience client et encourager l'inclusion financière
Par Dr Stephen Topliss et Nina Kerkez, LexisNexis
La société moderne est préoccupée par la confidentialité des données, à juste titre. En relâchant les données personnelles de millions de personnes dans la nature, la violation des données est désormais un processus répandu qui fait souvent la une des journaux. La technologie marketing numérique sophistiquée permet d’afficher des publicités ciblées à l’attention des internautes, ce qui donne aux consommateurs le sentiment étrange que leurs habitudes de navigation et leurs intérêts sont sous surveillance. Les géants de la Silicon Valley dominent le monde numérique, en offrant des services au-delà de leurs prérogatives d’origine, ce qui attise l’inquiétude du public face à la puissance et la portée de ces entreprises commerciales.
Les autorités de réglementation ont agi rapidement pour traiter ces préoccupations. Le Règlement général sur la protection des données (RGPD), que le Parlement européen a convenu d’établir en tant que loi type régissant la protection des données personnelles des citoyens européens par les sociétés en avril 2016, sert de base pour les réglementations similaires votées à travers le monde, comme le « California Consumer Privacy Act (CCPA) », le « Brazilian Data Protection Act (LGPD) » ou encore l’« Indian Personal Data Protection Bill (PDP) ». Ces règlements visent principalement à donner aux particuliers le contrôle de leurs données personnelles. Les complexités de la réglementation et les amendes considérables associées à toute non-conformité peuvent toutefois provoquer une certaine réticence quant à l’utilisation des données client, quelle qu’en soit la fin, y compris lorsque le client final pourrait en bénéficier.
Une réaction disproportionnée à l’évolution réglementaire a également été constatée plusieurs années auparavant en 2012, lorsque la directive européenne sur la vie privée et les communications électroniques, ou « Cookie Law », a été introduite dans un effort de réduire l’utilisation des cookies spécialement conçus pour traquer les utilisateurs à des fins marketing. Certains pays ont interprété ce règlement en faisant preuve d’une grande prudence, en exigeant l’affichage d’une boîte de dialogue demandant l’accord de l’utilisateur final dès qu’il surfe sur un nouveau site internet, ce qui entraîne une expérience client médiocre.
Même si la réglementation vise à traiter des problèmes en particulier, elle ne devrait pas affecter involontairement les processus pouvant apporter des avantages à la société dans son ensemble. Lorsque la technologie moderne est utilisée de manière appropriée, elle peut exploiter un vaste ensemble de données numériques pour offrir un monde plus sûr, en réduisant le risque de fraude et de criminalité financière par exemple, tout en contribuant à offrir une meilleure expérience utilisateur dans le monde numérique. Dans de nombreuses juridictions, les législateurs pensent que l’utilisation des données à des fins de prévention des activités criminelles doit toujours prévaloir sur les préoccupations en matière de confidentialité des données. À ce titre, le partage des données peut permettre de prévenir les grands problèmes sociétaux tels que la traite des êtres humains ou le financement du terrorisme, parmi d’autres. Ce type d’utilisation est naturellement très différent d’un objectif marketing.
La technologie relative à l’identité numérique peut recueillir les données propres à l’ADN numérique complexe des transactions en ligne, qu’il s’agisse de logins, d’opérations de paiement ou de demandes de création de comptes.
En reliant toutes les bribes d’informations qu’un utilisateur laisse lors de ses transactions en ligne pour comprendre le lien qui les unit entre les canaux/points d’accès au niveau international, les entreprises, les organisations, voire les gouvernements, peuvent bénéficier d’une approche consolidée pour lutter contre la criminalité dans la sphère numérique. En suivant les principes de la confidentialité par essence, en utilisant par exemple les techniques de tokenisation pour protéger les données client, l’identité numérique permet aux utilisateurs de confiance d’effectuer leurs transactions de manière transparente tout en détectant et en signalant les comportements à risque élevé à des fins d’évaluation avant le traitement des transactions.
Les banques de tier 1 à travers le monde utilisent les renseignements sur l’identité numérique pour mieux comprendre le niveau de fiabilité de leurs clients dès qu’ils demandent un nouveau produit ou service, et tout au long de leur relation : du login à la modification des coordonnées et aux paiements. Ces renseignements optimisent l’évaluation des risques en ligne approfondie, les stratégies d’authentification silencieuse, l’analyse des données axées sur le client et la fonctionnalité liée au consortium qui permet le partage des renseignements au sein de la banque et des réseaux bancaires régionaux.
L’analyse des données au sein d’un réseau d’identités numériques international permet d’évoluer d’une prévention de la fraude tactique vers l’application d’initiatives stratégiques pour lutter contre les réseaux de mules internationaux, qui facilitent le transfert des fonds pour une variété d’activités criminelles, dont la fraude, le blanchiment d’argent, le trafic de drogue et le financement du terrorisme. Tandis que certains comptes mules sont directement gérés par les réseaux criminels, la plupart appartiennent à de jeunes adultes pauvres, naïfs ou indécis, recrutés via des campagnes soigneusement ciblées. En identifiant et en bloquant les réseaux de mules rapidement, certaines de ces victimes peuvent éviter de plonger dans la criminalité.
Mais l’identité numérique ne se contente pas de stopper la fraude et les activités criminelles. Elle peut également stimuler la valeur économique et enrichir la vie des utilisateurs. Citons notamment le commerce électronique transfrontalier, qui permet aux consommateurs de s’approvisionner n’importe où dans le monde. Alors que de plus en plus d’entreprises ouvrent leurs sites aux achats transfrontaliers, le taux de refus est jusqu’à 6 fois plus important que pour les achats effectués au sein du pays. Cela s’explique principalement par le manque de données sur l’acheteur – problème qui peut être traité en utilisant les renseignements internationaux sur l’identité numérique. Ce vaste ensemble de données est également employé dans le cadre d’une approche plus globale dédiée à étudier le moyen d’offrir des petites lignes de crédit aux particuliers qui ne peuvent pas bénéficier de systèmes de prêts traditionnels. L’inclusion financière dans les pays en développement est extrêmement importante, surtout dans les régions défavorisées. Ce type de technologie peut améliorer l’inclusion et la transparence des transactions qui ont lieu dans les régions émergentes. L’argent est transféré, en ligne ou hors ligne, mais l’inclusion dans la société numérique favorise la prospérité et la croissance financière des utilisateurs.
Pour conclure, les données client doivent être systématiquement protégées, tout en étant disponibles à des fins d’utilisation responsable pour autonomiser et enrichir la prise de décision lors de la protection de ces clients au quotidien. Dans le monde numérique, la technologie liée à l’identité numérique, qui permet de protéger les clients de la fraude et d’éradiquer les activités criminelles liées aux crimes financiers, en est un parfait exemple. Lorsqu’elle est spécialement adaptée à l’économie numérique internationale, la cybercriminalité est un fléau interconnecté, complexe et en constante évolution. Elle doit être réduite en adoptant la même approche : des défenses interconnectées, multicouche, et qui fonctionnent au-delà des frontières. Nous devons promouvoir de manière active l’utilisation de la technologie liée à l’identité numérique, sous réserve que les bases soient en place pour protéger dûment les données.
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