Ecrit par : Jean Lindner, Responsable Marketing Afrique, Thales
Comment les gouvernements africains peuvent-ils optimiser leurs ressources technologiques et financières pour gérer leurs systèmes d’identité? Aussi difficile que cela puisse paraître, il existe des exemples de solutions pragmatiques, comme au Burkina Faso.
Le défi
FAIRE DURER LE SYSTEME ELECTORAL
Faire en sorte que les systèmes d’identité soient durables sur le continent africain est une question complexe. À une époque où la technologie et les équipements biométriques s’améliorent chaque année, les autorités africaines sont confrontées au défi non seulement d’acheter des systèmes d’identité mais aussi de les maintenir dans le temps. Cela vaut, par exemple, pour les programmes d’identité nationale ainsi que pour les programmes d’enregistrement des électeurs. Les projets électoraux reflètent bien la complexité à laquelle les gouvernements sont confrontés: nécessité d’avoir un système biométrique à jour pour garantir l’unicité des votes avec des ressources humaines et financières limitées pour assurer support et maintenance. Ainsi, le matériel électoral est parfois acquis à la hâte avant les élections. C’est le défi auquel le Burkina Faso était confronté pour la mise à niveau de son registre électoral, en amont des élections présidentielles d’octobre 2020 et des élections législatives de mars 2021. L’objectif de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) fut de maximiser le cycle de vie des équipements existants, de l’utiliser le plus longtemps possible.
Contexte actuel : un système déjà en place
Un exemple éloquent est le cas de l’enregistrement des électeurs au Burkina Faso dont le système a été fourni par Thales en 2012. Celui-ci comprenait 3 500 kits et logiciels mobiles biométriques ainsi qu’une base de données biométriques, fournis à la CENI avec l’aide d’un partenaire local. Les données des électeurs furent collectées, leurs empreintes digitales capturées, les doublons retirés avant l’établissement de la liste électorale finale, et la création d’une carte d’électeur. Une solution de bout en bout a été fournie avec 3 800 opérateurs formés et 4,4 millions d’électeurs inscrits en trois mois dans 15 000 bureaux de vote.
La solution
REUTILISATION
L’approche pratique utilisée par le Burkina Faso n’était pas de changer son système existant. Pour l’enregistrement des électeurs, la CENI a choisi de combiner à la fois la remise à neuf de 1 850 kits d’enregistrement mobiles existants avec l’achat de 3 150 nouveaux kits et logiciels d’inscription mobiles. L’équipement a été livré en plusieurs lots : fourniture des composants du kit entre fin décembre 2019 et fin janvier 2020 pour la remise à neuf des équipements existants avec contrôle qualité et mise à jour logicielle. En effet, un outil de qualification d’industrialisation spécifique a été utilisé pour vérifier le fonctionnement des kits et tester les logiciels. Côté système, le site central a été réutilisé et mis à jour avec de nouveaux serveurs et logiciels, un moteur biométrique de nouvelle génération.
Les avantages
ECONOMIQUE
Tout d’abord, les ressources financières ont été optimisées : une partie des équipements existants a été reconditionnée avec des composants technologiques récents, tandis qu’une autre partie a été achetée. Ainsi, un budget supplémentaire est envisagé pour l’achat de nouveaux équipements tels que des dispositifs de vérification des électeurs.
ECOLOGIQUE
Ensuite, certains composants ont été recyclés : batteries, imprimantes et câbles ont été vendus et réutilisés par des entreprises locales. Enfin, la remise à neuf des kits et l’installation ont été effectuées par un partenaire local de longue date, ce qui souligne la nécessité de travailler main dans la main dans le pays. Notre partenaire iConcept a recruté 35 personnes qui ont effectué la modernisation en seulement 3 jours.
DURABLE
Enfin, la durée de vie du système a été prolongée avec succès et celui-ci pourra être utilisé pour les dix prochaines années et plus, si les mises à niveau sont effectuées de la même manière.
Enseignements tirés
Deux leçons principales font de ce programme de rénovation du Burkina Faso un succès.
CONFIANCE
Premièrement, les commissions électorales doivent faire confiance aux fournisseurs de biométrie réputés et entretenir des partenariats avec eux. Thales est une entreprise établie depuis des décennies dans ce champ d’activité et assure les services d’assistance à la CENI depuis plus de huit ans. Un fournisseur doit pouvoir être un partenaire de longue durée, au fil des années : discuter de la feuille de route du programme avec ses clients, anticiper les nouveaux produits ainsi que les mises à niveau matérielles et logicielles. Au Burkina Faso, cela n’aurait pas pu se produire avec des fournisseurs « ponctuels » aux capacités logistiques et technologiques limitées.
MAINTENANCE
Deuxièmement, les commissions électorales doivent s’approprier pleinement leurs programmes d’enregistrement des électeurs, en tenant compte des élections à long terme - et non comme un événement indépendant unique. Alors que certains pays ont récemment acheté du matériel d’enregistrement et d’authentification des électeurs à un coût important, le Burkina Faso a choisi une autre voie, avec un meilleur rapport coût / efficacité. Cela implique, non seulement de s’assurer de bénéficier des solutions annuelles de maintenance de son fournisseur Thales, mais également de développer des capacités en interne. Pour le stockage, un entrepôt sécurisé dans les locaux de la CENI a été utilisé pour sécuriser les kits d’enregistrement mobiles. De plus, la commission électorale a réussi à capitaliser sur les compétences opérationnelles et les connaissances actualisées par l’utilisation continue de l’équipement : son propre personnel avait l’expertise pour gérer l’équipement de manière autonome avec discipline, y compris les inventaires et les audits, pour gérer le temps d’alimentation de la batterie par exemple.
Conclusion
La CENI a réussi à combiner la réutilisation et la mise à niveau des systèmes existants, ainsi que l’achat d’équipements neufs, pour s’assurer de la continuité et la robustesse de l’enregistrement des électeurs. C’est bien la preuve qu’il n’est pas toujours nécessaire d’installer un nouveau système toutes les deux élections, mais plutôt une bonne décision de combiner à la fois le système hérité et les nouvelles améliorations technologiques au profit des citoyens.
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